30/09/2010

Table des matières

Table des matières
Cliquez sur le nom du chapitre pour y accéder



Livre Un : Azeroth


     Chapitre I : Une étrange rencontre
     Chapitre II : Xyla
     Chapitre III : Trouver un Maître druide
     Chapitre IV : Xyla toute seule
     Chapitre V : Lavinis
     Chapitre VI : Nouvelle rencontre
     Chapitre VII : A la recherche d’Ikhé
     Chapitre VIII : Plume et ferrailles
     Chapitre IX : Mère poule
     Chapitre X : Désert



Livre Deux : Outreterre


     Chapitre I : La Porte des Ténèbres
     Chapitre II : Flammes et démons
     Chapitre III : Un apprentissage douloureux
     Chapitre IV : Shattrath
     Chapitre V : Séparations
     Chapitre VI : L’arène de sang
     Chapitre VII : Un vol vers Ombrelune
     Chapitre VIII : Malevih



Livre Trois : Norfendre


     Chapitre I : Nouveau départ
     Chapitre II : L’Accostage de la Vengeance
     Chapitre III : Sinival
     Chapitre IV : Dalaran
     Chapitre V : Golden Tree
     Chapitre VI : Affrontement final
     Chapitre VII : A la croisée des chemins


                                     

Commentaires

Vous avez adoré un personnage en particulier ? Vous en avez détesté un autre ? Ou bien vous avez aimé le détester… Venez poster ici vos commentaires et appréciations sur l’histoire.


Prologue

Prologue

Alors que la guerre fait rage en Azeroth, que les peuples se déchirent et que le Fléau se répand, il existe encore quelques lieux suffisamment paisibles pour y avoir vu grandir une jeune druidesse talentueuse. Eloignée de sa terre natale, Xyla doit évoluer seule dans ce monde hostile, malgré qu'elle n'en ait jamais rien appris. Heureusement pour elle, elle tombe sur Lavinis, une elfe de sang paladin très ambitieuse.
Faisant route ensemble désormais, elles parcourent de nombreuses terres et font de multiples rencontres.
Xyla trace progressivement son destin mais que devra-t-elle y affronter, en bout de course?

29/09/2010

Une étrange rencontre

Une étrange rencontre


A l’aube de ses beaux jours, Vangelis retourna vivre en Mulgore pour y retrouver son enfance et son origine. L’herbe grasse de ses terres natales la fit sourire et elle se sentit comme libérée de ses tracas de la guerre qui résonnait au nord. Elle passa les deux premiers jours à l’auberge de Sabot-de-Sang, y prenant du bon temps, faisant chaque chose calmement. Elle alla pêcher dans la petite rivière qui bordait le village, courut après les trotteurs des plaines, sans intention de leur faire du mal, se roula dans l’herbe avec Ikhé. Vangelis retrouva la petite taurène qu’elle avait oublié. Au crépuscule du second jour, elle était assise en haut d’une colline et observait le coucher du soleil. Elle appréciait la douce chaleur sur sa peau noire et la couleur rouge du soleil colorait les nuages aux tons pastels allant du lilas aux terres ocres qu’elle avait déjà pu fouler.

Vangelis sortit un vieux carnet orné d’une couverture en cuir de kodo et maintenu fermé par une lanière de cuir déchirée. Elle l’ouvrit et esquissa un sourire en relisant ses premiers exploits. Tout en caressant Ikhé d’une main distraite, Vangelis marmonnait quelques bribes de phrases, comme un rituel qu’elle aurait prononcé. Dans une profonde inspiration, elle releva les yeux de son carnet pour jeter un dernier regard à sa chère terre qui s’endormait paisiblement, bercée par une bise et les derniers rayons de soleil. Et dans les sous-bois, un peu plus en aval, elle vit une ombre qui se mouvait. Une ombre bien trop grosse pour la faune qui pouvait y courir. De nature curieuse, elle descendit de son perchoir pour voir cette chose de plus près. Plus elle s’approchait et plus elle pouvait distinguer les grognements apeurés de ce qui pouvait bien être une bête blessée. Elle ralentit le pas et s’accroupit pour ne pas se faire remarquer. L’ombre se démenait comme un diable mais restait à la même place. Vangelis s’approcha encore un peu et distingua un ours emmêlé dans des ronces et écrasé en partie par … un ballon rose ? Son instinct de chasseresse lui fila entre les mains et en deux temps trois mouvements, l’ours se retrouva les quatre pattes et la gueule ficelées. En remontant la bête sur son dos, Vangelis eut une sensation d’avoir capturé un animal bien plus rare qu’un simple ours.

Elle emprunta la route qui descendait au village de Sabot-de-sang et réfléchit à voix haute comment elle allait cuisiner sa proie. Mais aussi étrange que celui put lui paraître, l’ours comprit ses paroles. Il commença à se débattre avec une force rageuse et s’expulsa du dos de Vangelis qui tomba à la renverse. L’ours se débattit tant et bien qu’il en arracha ses liens et s’enfuit rejoindre le sous-bois où Vangelis l’avait capturé. Etait-ce la chute qui lui avait fait cogner sa tête trop durement sur le sol ou bien avait-elle réellement entendu cet ours crier après un « doudou » ? Vangelis se frotta les yeux et resta assise à méditer. Et malgré ce paysage qui tentait de faire tout son possible pour lui rappeler la gentille taurène innocente qu’elle avait pu être, elle sentit monter en elle un sentiment de désir … un désir obsessionnel de vouloir retrouver cet animal et de le tuer. Parce qu’aucun animal n’avait osé jusqu’ici lui résister.

* * *

Cachée sous un gros tas de branchages et de feuilles, Vangelis attendait son ours depuis l’aube. Elle avait usé cette idée dans sa tête pendant toute la nuit : attraper et tuer la bête. Son lanceur de pièges réglé sur une distance optimale, elle n’en faisait dépasser que l’extrémité de sa cachette. Sa discrétion était travaillée par l’expérience et le temps. Son corps était figé tel un roc mais sa concentration était affûtée, l’œil brillant et le regard perçant, rien ne pouvait lui échapper.

Ikhé, quant à lui, se promenait allègrement dans la plaine en aval du sous-bois où Vangelis traquait sa proie. Il ne se souciait plus des délires obsessionnels de sa maîtresse depuis longtemps déjà mais sa fidélité pour elle restait inchangée. Ils avaient appris à vivre ensemble et Ikhé était sans doute le loup le plus capable à produire des secours en cas de brûlures, explosions, hallucinations et autres amusements du même genre. A force, ça lui était devenu chose courante et il apprenait à prévenir l’arrivée de ce danger.

Midi approchait et Vangelis ne baissait pas sa vigilance. Les sens en alerte, rien ne pouvait lui échapper. Cet ours était entré dans ce bois la veille, il devrait bien en sortir un moment ou un autre ! Mais Vangelis n’était pas au bout de ses surprises. Après avoir cru entendre un ours crier après un « doudou », elle vit soudain ce qui devait sans doute se rapprocher le plus d’un lion – une sorte de bête aussi massive qu’un ours mais jaune, avec une crinière – sortir de nulle part et lui foncer droit dessus, l’air affolé. De s’être attendue à tout instant à voir apparaître l’ours de la veille, elle fut tellement surprise qu’elle en oublia de tirer et le lion la piétina sans arrêter sa course folle. Elle extirpa tant bien que mal la crosse de son fusil qui s’était enfoncée dans sa narine gauche et se redressa douloureusement. Le lion était déjà loin ;  on ne pouvait plus voir qu’un point jaune s’affoler dans la plaine verte. Vangelis soupira longuement en se demandant ce qui avait bien pu changer à ce point en Mulgore. Les créatures qu’elle y croisait étaient tout ce qu’il y avait de plus bizarre…

Elle récupéra ses affaires cachées sous les feuilles et se remit en marche vers le village, en faisant un petit détour pour reprendre Ikhé qui gambadait. Elle se laissait descendre passivement par la gravité et rejoignait distraitement le sentier. Ses pensées étaient encore dans ce qu’elle avait pu voir. Du monde qu’elle avait déjà parcouru, elle n’avait jamais eu l’occasion d’observer une bête aussi étrange. Elle finit par rejoindre Ikhé et ce ne fut qu’une fois assise à côté de lui qu’elle constata qu’il n’était pas seul : il était lancé dans une discussion passionnée avec … le gros lion ! Ikhé se tourna vers Vangelis qui restait bouche-bée et lui sourit :
-          Te voilà enfin ! J’ai fait une rencontre fort intéressante en ton absence. Il pointa le museau vers le lion qui était assis en face de lui. Ce dernier eut un raidissement en voyant Vangelis de plus près.
-          Ne t’en fais pas, dit Ikhé au lion, elle ne te fera pas de mal … enfin, pas cette fois-ci en tout cas. Et puis, tu n’as plus de raison de pleurer, je suis sûr que Vangelis trouvera une solution à ton problème ! Elle adore faire des expériences … ajouta-t-il sur un ton mal assuré.
Vangelis revenait petit à petit à ses idées et finit par articuler lentement :
-          Comment tu as fait pour attraper une bête pareille ?
Ikhé leva les yeux au ciel et lâcha un soupir désespéré.
-          Ma chère Vangelis, ce que tu as devant toi n’est rien d’autre qu’une jeune taurène !
Elle écarquilla les yeux et observa l’animal étrange et massif qui se tenait toujours devant elle. Une taurène, ça ? Cette … chose n’avait rien d’une taurène, encore moins d’une jeune taurène car la petite génisse était bien plus massive que Vangelis qui était arrivée à maturité. Et puis, ces formes, ce maintien, cette couleur, cette crinière, ces dents pointues, en rien cette bête ne pouvait être une taurène. En réfléchissant à toute vitesse, Vangelis se tourna vers Ikhé, le regard inquisiteur.
-          Tu n’aurais pas mangé un champignon fantôme ou deux, en t’amusant dans la plaine, par hasard ? J’ai déjà eu des hallucinations mais je suis sure que ça, ce n’est pas de ma race !
-          C’est justement là, son petit problème.
Ikhé passa outre des soupçons infondés de sa maîtresse, qu’il avait l’habitude d’entendre à chaque fois que ce qu’il voyait différait de la version de Vangelis – et ce genre de chose arrivait plus que fréquemment ! Il reprit ses explications, sous le regard de plus en plus affolé du lion.
-          Elle m’a raconté qu’elle avait été chassée par une grosse vache, hier soir, dans l’ombre et, de peur de la croiser à nouveau et qu’elle la reconnaisse, elle a essayé de se transformer en lion sans en maîtriser la discipline. Résultat des courses, elle se retrouve coincée entre un ours et un lion, d’où son aspect peu esthétique et elle ne sait absolument pas comment revenir à sa forme originale.
-          Une druidesse ! C’est ça ! C’est une druidesse ! Le regard de Vangelis s’éclaircit soudain. Incroyable, continua-t-elle, je ne les avais jamais vus dans leurs débuts ! Elle inspecta le lion de plus près, le sentit, goûta ses poils, chercha un pis, tout ça sous le regard terrifié d’Ikhé et de la druidesse qui n’osait pas bouger.
-          Eh bien, pourquoi ne vas-tu pas voir ton maître des druides ?
Ikhé intervint aussitôt :
-          Elle ne connait rien à la vie en civilisation, ni au monde des taurens. La petite a été élevée par une ourse, depuis sa plus tendre enfance. Pour ma part, je pense que ça a dû favoriser en elle des capacités à se métamorphoser et à faire ainsi partie des rares taurens à être assez sages pour atteindre une telle maîtrise. Qu’en penses-tu, druidesse ?
Il se retourna vers le lion qui venait de se planquer la tête dans un trou de chien de prairie et qui hurlait de peur. Dans une série de mots qui n’avaient aucun sens, on pouvait distinguer « mouche taurènivore ». Et de ce fait, Ikhé et Vangelis remarquèrent une petite mouche noire qui tournait autour de la druidesse qui hurlait de plus en plus fort.
Ikhé regarda le lion dans sa position de trotteur perdu, avec un air plus effaré que jamais.
-          Ou bien, c’est un don tout à fait aléatoire qui n’a rien à voir avec la sagesse…

28/09/2010

Xyla

Xyla


La petite druidesse avait dormi trois jours dans l’auberge où Vangelis avait pris une chambre. Ikhé et elle l’observèrent de longues heures, émerveillés par ses métamorphoses incontrôlées qui suivaient les émotions des rêves de la petite taurène. Parfois, de son aspect mi-ours mi-lion, une patte changeait, grossissait, devenait plus velue ou redevenait un sabot. Le visage tendait alors plus vers un lion, un ours, une taurène à la suite de ce qui venait. Vangelis restait médusée et absorbée par la petite taurène qui marmonnait des bribes de mots compréhensibles dans le charabia de ses rêves. Elle pouvait y distinguer régulièrement « doudou » et « maman ». Deux mots qui semblaient être des reliques de la civilisation qui avait probablement été offerte à cette taurène dans ses toutes premières années.
En croquant un champignon fantôme – qui était absolument nécessaire à ses réflexions, sous le regard réprobateur d’Ikhé – elle tentait de remettre en place les morceaux du puzzle de la vie de cette étrange druidesse. « Maman ». De quelle mère pouvait-elle bien rêver ? De sa vraie mère ou de cette ourse qui l’aurait élevée ? Avait-elle seulement connu ses véritables géniteurs ? Et qu’en était-il de ce « doudou » ? De quoi pouvait-il bien s’agir. Vangelis avait beau réfléchir et croquer des champignons fantômes, les énigmes semblaient de plus en plus complexes dans sa tête. Elle prit finalement congé de ses pensées et remarqua le regard soutenu d’Ikhé.
-          Il faudrait tâcher de lui trouver un Maître ! dit-il avec empressement sitôt l’attention prise de sa maîtresse.
-          Oui oui, répondit distraitement Vangelis.
Ses pensées étaient déjà reparties. Pourquoi lui trouver un Maître alors que cette petite pourrait faire le sujet d’expériences des plus intéressantes ? En parler à Ikhé ne ferait que compliquer les choses. Il ne pourrait pas comprendre. Il ne comprend rien aux expériences. Et puis d’ailleurs, personne ne comprend rien à ces magnifiques expériences ! Toujours à vouloir sauver leur vie avant de servir à la science.
-          Qu’est ce que tu disais ? lui demanda Ikhé.
-   J… j’ai encore pensé à voix haute, c’est ça ?
Elle eut pour réponse un acquiescement accusateur de la part de son loup. « Bien, on lui trouvera un bon Maître et qu’on n’en parle plus ». En prenant garde à bien fermer sa bouche, elle s’ajouta pour elle-même « Mais je compte bien essayer une ou deux petites expériences sur cette druidesse ! ».

* * *


La druidesse finit par se réveiller en pleine nuit, créant un tapage qui réveilla toute l’auberge, sauf Vangelis qui dormait à un mètre d’elle. L’aubergiste monta en furie dans la chambre d’où provenait un tel boucan, fracassa la porte sous sa colère et hurla aux convives de calmer cette folle ou de partir immédiatement. Ikhé s’inclina respectueusement devant l’aubergiste et tenta de lui expliquer que ce n’était pas sa maîtresse qui faisait tout ce bruit, avant de comprendre qui était réellement traitée de folle. Grimaçant, il tenta de consoler la druidesse qui projetait des traits lumineux et des éclairs verts dans toute la pièce en hurlant toujours après ce doudou. La nuit finit dehors, sous un pin avec pour paillasse l’herbe grasse des prairies de Mulgore.
Au petit matin, Vangelis émergea d’un sommeil lourd.
-          Dis-moi Ikhé, on ne s’était pas endormi à l’auberge hier soir ?
-          Si mais, à vrai dire, nous avons été victimes d’un déplacement forcé…
-          Merde, je devrais mieux régler ce déchiqueteur dimensionnel !
-          Non, en fait, c’est à cause de la druidesse que nous sommes ici.
-          Ne me dis pas qu’en plus, elle a le pouvoir de téléporter !
-          Bon, pour faire clair : elle s’est mise à hurler cette nuit et nous avons été priés de finir notre nuit dehors. L’aubergiste a demandé que tu viennes récupérer tes affaires aujourd’hui et que tu règles la note. Il ne veut plus de nous.
Vangelis parut étonnée de n’avoir rien entendu durant la nuit. Cet aubergiste, tout de même ! Expulser trois convives au milieu de la nuit parce que l’une d’entre eux ronflait un peu fort. Elle s’exécuta malgré tout, en ronchonnant mais sans dire le fond de sa pensée à l’aubergiste qui lui fit un accueil glacial.
-          Bien, je pense qu’il ne nous reste plus qu’à nous mettre en quête d’un Maître pour toi, ma petite ! Pas vrai ?
La druidesse se gratta les fesses en guise de réponse.
-   Ce serait bien de lui apprendre le langage et les manières, en chemin aussi ! ajouta-t-elle. « En route, Ikhé ! … Je ne sais pas du tout où on doit aller ! »

* * *

Au fil de la route qui se présentait très longue puisque le kodo ne pouvait transporter qu’un passager, la druidesse commençait à comprendre la subtilité du langage. Vangelis avait décidé de commencer par lui parler Taurahe puisque c’était dans cette langue qu’elle pleurait après sa mère et son doudou. Plus tard, elle serait probablement apte à comprendre et à parler Orc. Ainsi, au fur et à mesure de leur avancement, Vangelis ne cessait de parler à la druidesse en lui désignant les objets qui les entouraient. La satisfaction l’emplissait de se sentir à ce point utile, bien qu’elle n’était pas sure que la petite taurène était toujours à son écoute. De tous les peuples de sa race que Vangelis avait pu observer, c’était bien la première taurène qui lui paraissait aussi étrange et particulière. La druidesse pouvait passer des heures à chanter des chansons dans une langue inconnue, à répéter des gestes étranges que même Ikhé ne pouvait interpréter. Parfois, elle se voyait prise d’une crise de folie, courait dans tous les sens et finissait la tête dans le sol pour se cacher de choses qui n’existaient pas. En attendant de lui trouver un Maître, Vangelis essayait de provoquer des métamorphoses pour satisfaire sa curiosité. En jetant la druidesse dans un fleuve, elle réussit même à la faire se transformer en un lion avec des nageoires !

Après avoir marché d’un bon pas le premier jour, ils s’arrêtèrent à l’entrée du bois d’Orneval pour se reposer. Vangelis dressa une tente rudimentaire avec quelques branchages pour rassurer la petite taurène qui tremblait et hurlait à la mort par séquence. Ces bruits réguliers inspirèrent Vangelis qui sortit un bout de parchemin et un morceau de charbon pour tracer le schéma d’un système qui sonnerait automatiquement quand une personne non-admise se permettrait de franchir une limite fixée. Et elle le nomma fièrement « La sonnerie qui sonne automatiquement à l’approche de l’ennemi ». En se penchant sur les notes de sa maîtresse, Ikhé lui demanda s’il ne serait pas plus simple de nommer cela une alarme mais Vangelis le dévisagea et lui demanda ce qu’il pouvait bien connaître au monde des inventions. Elle le pria d’aller chasser pour le repas du soir, attendit qu’il soit suffisamment éloigné pour remplacer « La sonnerie qui sonne automatiquement à l’approche de l’ennemi » par « L’alarme de Vangelis ». Après quoi, elle roula son parchemin et s’approcha de la druidesse qui se tenait assise sur son gros postérieur d’ours en hurlant, la gueule en l’air, de manière toujours aussi mécanique et régulière.
-          Alors, dis-moi, ma petite, qu’as-tu retenu de cette journée très enrichissante en ma présence ? s’enquit Vangelis.
La petite taurène s’arrêta de hurler, abaissa lentement son museau pour le mettre à la hauteur de celui de Vangelis qui s’était assise en face d’elle et lui rota à la figure. Ce après quoi elle éclata de rire et alla se réfugier immédiatement dans la hutte. Vangelis resta déconcertée par ce qu’elle venait de subir et fut soulagée qu’Ikhé n’était pas là pour voir un tel spectacle. En redoublant de patience, elle se dirigea à nouveau vers la petite taurène, prit soin de garder une certaine distance cette fois et lui montra une pierre.
-          Tu peux me dire ce que c’est, ceci ?
La druidesse hocha la tête.
-          Bien, dit-elle sur un ton détaché, alors dis-moi ce que c’est !
La druidesse secoua la tête en signe de négation.
-          Mais c’est pas vrai ! Elle va me rendre chèvre, cette petite conne !
Vangelis projeta la pierre au loin et alla s’assoir dans son coin pour râler en marmonnant quelque chose à propos du repas qui se faisait attendre et que si ça continuait comme ça, c’est de l’ours-lion qu’elle mangerait ce soir.
Ikhé finit par revenir avec deux gros lapins et fut accueilli par la druidesse qui se jeta sur lui pour lui lécher la gueule et l’appeler « Maman ». Se ressaisissant, Ikhé se détacha tant bien que mal de l’étreinte puissante de l’ours-lion et entreprit de lui expliquer la différence entre lui et sa mère. Et à sa grande surprise – ainsi qu’à celle de Vangelis qui espionnait depuis son coin – la druidesse articula distinctement « Ik-hé ».

* * *

Jusqu’à une heure avancée de la nuit, Vangelis et Ikhé parlèrent avec la druidesse qui, le ventre rempli et se sentant plus en confiance avec le loup, s’appliquait à prononcer des mots puis des phrases dans le langage des taurens. Elle se blottissait contre Ikhé qui appréciait sa douceur et sa chaleur, bien qu’il avait tendance à se sentir écrasé par la présence massive de la druidesse dans sa métamorphose ratée. Tous trois autour du feu, ils appréciaient la simplicité de regarder la danse harmonieuse des flammes et leurs esprits s’assoupirent doucement, au fur et à mesure que baissait la lueur des braises.

Le lendemain, ils se mirent en marche dans le bois d’Orneval qui regorgeait de la présence magique des elfes de la nuit. Les arbres chantaient et balançaient leurs feuilles au rythme du vent. Ikhé et la druidesse semblaient se sentir parfaitement à leur aise dans cet environnement qui avait plus tendance à effrayer Vangelis.
-          La magie, ça n’apporte rien de bon ! Les explosions, il n’y a que ça de vrai ! annonça-t-elle à qui voulait l’entendre. Elle jeta un coup d’œil sur la druidesse qui avait à présent des sabots en guise de pattes arrières, malgré son aspect mélangé entre un ours et un lion. « Ouais, vraiment rien de bon la magie ! ».
-          Au fait, coupa Ikhé en se tournant vers la druidesse, est-ce que tu as un nom ? Maintenant que tu sais que je m’appelle Ikhé, qu’elle s’appelle Vangelis, comment tu t’appelles, toi ?
La druidesse fit mine de ne pas comprendre, au grand énervement de Vangelis qui avait perdu toute patience depuis l’événement de la pierre. Elle arrêta la marche, montra Ikhé et articula « Ik-hé ! », après quoi elle se désigna et articula « Van-ge-lis !» puis elle montra la druidesse et prit un air interrogateur. Aussi basique que sa méthode put paraître, elle porta ses fruits puisque le regard de la druidesse sembla s’illuminer et elle prononça « Xy-la ».
-          Xyla ! reprirent Vangelis et Ikhé en cœur.
La petite taurène répondit à son nom en s’agitant.
-          Au moins, ce sera plus facile pour les avis de recherche que je compte poster dans toutes les villes ! ajouta Vangelis.

27/09/2010

Trouver un Maître druide

Trouver un Maître druide


Après cinq jours de voyage, Vangelis, Ikhé et Xyla débouchèrent finalement dans une clairière qui respirait la magie. Vangelis sortit sa carte en toute hâte, ainsi que des crayons de couleur.
-          Je ne connaissais pas du tout cet endroit ! dit-elle en commençant à esquisser les reliefs du paysage qu’elle embrassait depuis son point de vue. « Ce monde cache vraiment de curieuses choses » ajouta-t-elle en dessinant une étendue d’eau bleue sur sa carte.
Xyla l’observait fascinée. Elle s’approchait de la carte de Vangelis au rythme des coloriages de celle-ci. Quand elle ne fut plus qu’à quelques centimètres et que sa respiration devint gênante pour Vangelis, cette dernière se décida enfin à accorder quelques minutes à la petite druidesse.
-          Tu vois, ça, c’est un crayon bleu ! lui expliqua Vangelis, en tendant son crayon vers Xyla. Elle remarqua à quel point la jeune taurène semblait passionnée par ce petit bout de bois. « C’est un crayon magique ! Parce que je suis une grande taurène avec de grands pouvoirs ! Et je peux créer la couleur avec un simple bout de bois, vois-tu ? ». Et elle acheva le lac sur sa carte pour illustrer ce qu’elle venait de dire.
Ikhé qui observait la scène leva les yeux au ciel en trouvant sa maîtresse plus pathétique que jamais. Il soupira aussi bruyamment qu’il le pu afin de faire comprendre à Vangelis son point de vue.
Mais Vangelis l’ignora et se contenta de continuer à hypnotiser Xyla, se plaisant de ce sentiment de toute-puissance qu’elle puisait abondamment dans les yeux émerveillés de la druidesse qui buvait ses paroles avec un grand sourire béat.
-          D’ailleurs, je t’aime bien, petite Xyla. Et si tu es sage et que tu apprends bien tes leçons avec ton Maître, je t’offrirai mon crayon bleu magique ! finalisa Vangelis, ce qui eut pour effet sur Xyla une réaction hystérique.
La druidesse se mit à courir dans tous les sens en chantant une chanson dont les paroles et l’air restaient méconnaissables et firent penser à Vangelis qu’elle devrait bientôt huiler quelques rouages de ses vieilles inventions.
Dans un sourire tendu, elle prit Xyla par sa grosse patte velue et la traîna tant bien que mal vers le petit village situé au bord du lac.
Après avoir tiré la druidesse en transe sur tout le chemin, Vangelis arriva finalement à une sorte de portail gardé par une créature aussi étrange que le paysage qui se dressait dans la clairière. L’être était un croisement entre un cerf, probablement aussi un elfe de la nuit et ses doigts ressemblaient à de fines branches délicates. Il se pencha sur Vangelis et Ikhé, l’œil vif et intelligent et prit la parole, sur un ton grave et puissant qui faisait penser à une immense chute d’eau :
-          Qui êtes-vous, voyageurs ? Vous ne semblez pas être des druides et sachez que tout être n’ayant pas reçu le don de la Nature n’a que faire ici. Vous êtes priés de quitter les lieux immédiatement. Vous n’êtes pas les bienvenus !
Vangelis avala péniblement sa salive et prit à son tour à la parole, sur un ton mal assuré et aigu, faisant penser à un animal piégé qui hurlerait ses derniers instants :
-          Salutations … monsieur, si je puis me permettre de vous nommer ainsi …
La créature l’observa silencieusement.
-          Hum ! Faut dire que c’est pas facile non plus, t’es un croisement entre un arbre, un cerf et un elfe alors, je ne sais plus quoi dire moi et puis, je ne cause pas aux arbres, d’habitude !
Elle éclata d’un rire crispé qui alla s’écraser sur le silence glacé de la créature qui avait à présent croisé les bras en guise d’impatience.
Ikhé s’empressa de prendre la parole avant que sa maîtresse n’en dise plus.
-          Salutations. Je suis Ikhé, loup dévoué de la chasseresse Vangelis. Nous ne sommes pas druides, en effet mais nous sommes ici pour accompagner une jeune druidesses perdue et orpheline qui a des talents plus qu’évidents et qui pourrait promettre de grandes choses, à conditions que nous lui trouvions un Maître digne de ce nom. Et je sais que seul cet endroit pourrait nous faire apparaître une telle personne !
Après quoi, il s’inclina en marque de respect profond et s’éloigna doucement à reculons, en gardant le museau bas, attendant une décision clémente de la part de la créature.
-          Fort bien ! Je suppose qu’en ces conditions, nous pourrions faire une exception ! Mais votre séjour ici ne peut s’éterniser. Vous devrez partir dès que le Maître aura décidé que la druidesse pourra se débrouiller seule. Montrez-moi donc cette jeune personne talentueuse, ajouta-t-il enthousiaste.
Vangelis et Ikhé échangèrent un regard inquiet puis s’écartèrent tout deux pour présenter Xyla qui avait réussit entre-temps à s’étrangler à moitié en enroulant sa queue autour de son cou. Ikhé s’empressa de la dégager et de la pousser vers la créature qui impressionna tellement Xyla qu’elle poussa un cri d’horreur et une flaque s’étala à ses pieds. Ikhé fit une grimace et en regardant de plus près vit que c’était du lait … Il releva la tête vers Xyla et l’observa d’un air interloqué.
La créature, quant à elle, ne trouvait probablement pas les mots pour qualifier la druidesse. Il restait sur place, les bras ballants et les yeux écarquillés.
Vangelis tira alors Xyla par la patte arrière et lui fit signe de s’éclipser discrètement vers le village.
-          Bien, annonça-t-elle à la créature, on ne va pas vous déranger plus longtemps, la nuit tombe et il nous faut encore trouver l’auberge. Merci pour votre accueil et votre convivialité.
Après quoi, elle s’empressa de s’engouffrer dans la première maison venue avec Ikhé qui lui courrait sur les sabots et Xyla qui tentait de se cacher la tête sous la cape de Vangelis.
Ce fut une elfe de la nuit qui les accueillit en souriant.
« Bienvenue, druidesses et … » son regard se posa sur Ikhé qui se sentit mal à l’aise et fit une grimace. Vangelis s’empressa d’expliquer que c’était son mulet et qu’il portait les vivres et Ikhé ajouta un « Hi-haaaaan » peu convainquant pour appuyer les dires de sa maîtresse.

* * *

Au réveil, Vangelis eut le plaisir de voir que le petit déjeuner leur avait été servi dans la chambre, sur une table ornée d’une belle nappe rouge aux fines broderies dorées. Il y avait une coupe débordante de fruits frais, du pain qui semblait avoir été fait avec des rayons du soleil levant et quelques spécialités des elfes ou des druides peut-être. Ikhé avait également reçu sa part : du foin, de l’avoine et du sel. Il jeta un regard assassin à Vangelis.

Gênée, elle s’assit à la table en tournant le dos à son loup. Elle se délecta d’avance en regardant encore une fois l’ensemble du festin mis à sa disposition. Mais quelque chose manquait à ce décor… Forcément, elle passa en revue tout ce qui se trouvait dans la pièce. Son regard s’illumina soudain. Elle se leva, se dirigea vers son sac et sortit un petit emballage de celui-ci dans lequel se trouvaient trois champignons fantômes. En se rasseyant à table, elle fut à nouveau dérangée par un élément manquant. Elle regarda à nouveau autour d’elle et ses yeux s’arrêtèrent à présent sur sa gourde. Un petit déjeuner sans un peu de rhum ne serait pas un petit déjeuner digne de ce nom ! Elle se leva donc à nouveau pour prendre sa gourde qu’elle avait déposée à veille à côté de sa couche. Puis, en posant la main dessus, son regard s’arrêta sur la couche de Xyla ! Xyla, c’est ça qui manquait depuis son réveil ! Où avait bien pu passer la druidesse ?
-          Les voleurs ! s’écria-t-elle, faisant sursauter Ikhé qui se concentrait pour goûter du steak plutôt que de l’avoine. « Ils ont volé mon expér… euuuh, je veux dire, ils ont volé Xyla ! ».
Elle se rua dans les escaliers de l’auberge pour hurler sur l’elfe qui les avait accueillis la veille. Mais avant que le moindre son n’ait pu sortir, elle entendit la voix de la druidesse dehors, chanter une de ses chansons étranges. Elle bouscula l’elfe qui était restée plantée au milieu de la pièce et sortit en toute hâte pour découvrir où ils retenaient la pauvre druidesse prisonnière. Naïve comme elle était, ils lui auraient fait croire que c’était un jeu et elle l’aurait cru ! Tout en courant, Vangelis nota sur un bout de papier l’idée qui venait de lui passer par la tête et elle se dit de la réitérer si elle retrouvait la druidesse. Elle arriva finalement sur un petit pont où elle tomba nez à nez avec une jeune taurène toute blanche, vêtue d’étoffes délicates. La petite taurène regarda Vangelis en souriant. Elle avait le crin épais et avait tâché de le dompter en deux petites tresses qui lui tombaient sur les épaules. Au bout de sa corne droite était attaché un bout de ficelle qui était relié à un hameçon lancé dans la petite rivière qui coulait sous les deux taurènes.
-          Dis-moi, petite, tu n’aurais pas vu un gros ours bizarre avec une crinière et des sabots qui chantait des chansons sur un air de mécabécane ? demanda Vangelis à la petite taurène qui l’observait toujours en souriant.
Elle lui répondit d’un signe négatif de la tête et se replongea dans sa pêche, en faisant des mouvements de tête désaccordés, afin de sentir si le fil était tendu.

Vangelis continua son chemin, trouvant malgré tout à la petite taurène blanche un air familier. En songeant à l’endroit où elle aurait déjà pu avoir rencontré cette cadette, elle fit distraitement le tour du village, oubliant déjà ce pourquoi elle était partie en toute hâte. Ce fut finalement son estomac qui la ramena à la réalité en lui rappelant qu’elle n’avait pas encore profité du festin laissé dans la chambre de l’auberge.
En remontant lourdement les marches qui menaient à l’étage de l’auberge et à sa chambre, elle se rappela finalement de la disparition de Xyla mais sa faim prit le dessus et elle repoussa ses recherches à plus tard. En poussant la porte de la chambre, elle constata qu’Ikhé s’était permis de s’installer sur la couche de la pauvre petite druidesse portée disparue. Puis, en observant plus attentivement, elle remarqua que la couverture sur laquelle le loup prenait ses aises semblait plus rembourrée qu’à l’habitude. Elle s’avança d’un pas énervé vers Ikhé, le chassa nerveusement de la couche et frappa un grand coup pour aplatir la couverture qui hurla de douleur.
Vangelis reconnu immédiatement et avec soulagement la voix de Xyla. Elle se tourna vers Ikhé, avec un grand sourire :
-          Elle n’avait pas été enlevée, elle s’était juste cachée ! annonça-t-elle plus pour elle-même que pour partager la bonne nouvelle.
Enfin, elle souleva la couverture pour retrouver sa petite druidesse mais y trouva la taurène blanche qu’elle avait croisée sur le pont, un peu plus tôt. Elle observa l’inconnue qui s’était à présent levée du lit, avait remis le drap sur elle et se promenait dans la pièce à la manière d’un fantôme en poussant des cris étranges, bien plus effrayants que ceux que peuvent émettre les véritables mort-vivants. Dans un frisson, Vangelis revint à ses idées mais ne parvenait toujours pas à comprendre ce que cette taurène pouvait bien faire dans sa chambre et surtout, où avait bien pu passer Xyla ?
La bouche entre-ouverte depuis le début de sa cogitation, elle se tourna vers Ikhé, l’air bête. Le loup qui avait pris l’habitude depuis toutes ces années, lui apporta une réponse à la question prononcée par le silence et l’air abruti de Vangelis :
-          C’est Xyla, tu ne la reconnais pas ? Le Maître lui a montré comment reprendre sa forme taurène ce matin. Et apparemment, elle est très douée et dotée d’une intelligence vive !
Pour appuyer ses dires, il se tourna vers Xyla qui venait de rencontrer un miroir et se cachait sous le lit en hurlant de peur. Devant le miroir, le drap – coupable du crime – trempait dans une large flaque de lait.
Ikhé ne trouva rien à ajouter et Vangelis non plus d’ailleurs. Tout deux restaient sidérés par la scène.
Finalement, Ikhé trouva les mots pour demander à Vangelis s’ils ne pouvaient pas abandonner Xyla dès aujourd’hui et laisser les druides, êtres armés de sagesse, de bonté et de patience – surtout de patience – faire son éducation et son apprentissage.